A l’issue du deuxième trimestre, le MPCC a relevé un nombre de cas de dopage dans le cyclisme relativement faible, le 13e parmi les sports inventoriés (9 cas en 2025). Au-delà de la situation sanitaire de notre discipline, certains événements récents interrogent cependant notre mouvement sur la question de la transparence.
La tension n’est toujours pas retombée entre l’Agence mondiale antidopage (AMA) et son homologue américaine (USADA), indisposée à verser sa quote-part pour le budget de fonctionnement 2025 de l’AMA. Depuis deux ans, l’USADA, et son directeur général Travis Tygart, est en guerre ouverte avec le président fraîchement réélu du régulateur mondial de l’antidopage, Witold Banka. Sont mis en cause le supposé « manque de transparence » de l’agence, sa gouvernance jugée non démocratique et sa gestion de l’affaire des nageurs chinois* qui a éclaté au printemps 2024, donc à quelques semaines des Jeux olympiques de Paris. Les échanges par voies de presse entre les deux dirigeants nuisent ainsi à l’image du sport et au monde de l’antidopage.
La tenue récente des « Enhanced Games » (du 21 au 24 mai), ces jeux en marge du mouvement olympique autorisant des produits améliorant les performances, et une nouvelle offensive contre l’AMA menée par des sénateurs américains rappellent que l’union autour de la lutte antidopage reste difficile, si des considérations politiques menacent le combat pour un sport juste et propre. Ce dernier ne peut être assuré que si tous les acteurs impliqués jouent la carte de la transparence, une notion maintes fois répétée par l’USADA lorsque celle-ci évoque ses griefs à l’attention de l’AMA.
L’agence peine, en effet, à apporter des réponses rapides et efficaces sur l’interdiction de certaines méthodes de médicalisation aux frontières du dopage, telles que l’inhalation de monoxyde de carbone (interdite par l’UCI depuis le 1er février), et ce pour tous les sports. D’autres interdictions de substances comme le Tapentadol, opioïde plus puissant que le Tramadol et utilisé par certaines équipes, n’ont toujours pas été prononcées. Enfin, les dernières grandes investigations journalistiques nous amènent également à être vigilants sur l’administration de produits en microdose, où là encore d’importants progrès doivent être réalisés sur leur détection.
Garder la lumière allumée
LA TRANSPARENCE EST UN MAÎTRE-MOT DE L’ANTIDOPAGE
C’est surtout grâce à la transparence, celle des athlètes honnêtes et des instances de contrôle (agences nationales, laboratoires, fédérations, etc.) que le dopage pourra reculer. C’est également grâce à elle que le MPCC peut établir régulièrement un état des lieux de la lutte antidopage à travers les Chiffres de la Crédibilité. Ainsi, certaines agences et fédérations internationales ne rendent pas publics les noms des athlètes incriminés dans des affaires de dopage, le plus souvent pour des raisons d’ordre juridique, notamment sur la protection des données personnelles.
Cette limite a trouvé une nouvelle illustration après la publication d’un article par le journaliste spécialisé du monde de l’antidopage Hajo Seppelt, établissant qu’une centaine d’athlètes pris en défaut par l’agence allemande antidopage (NADO Germany) n’ont jamais vu leurs noms rendus publics depuis 2020, en grande partie en raison de la protection de leur anonymat. La NADO Germany tente ainsi de se prémunir de nombreux recours juridiques qui mettraient en péril ses finances, ce qui ne l’a pourtant pas empêché de communiquer sur les cas des athlètes Sofia et Sara Benfarès, en 2024, et beaucoup plus récemment sur le canoéiste Martin Hiller, champion du monde de sa spécialité. L’AMA souligne d’ailleurs dans le Code mondial, un règlement imposé à tous ses signataires dont l’Allemagne, que la divulgation publique du nom de l’athlète est possible, si ce dernier en est informé.
Reveal – Lancez l’alerte
L’ATHLETISME EN PREMIERE LIGNE
Il en va autrement d’une instance comme l’AIU (Athletics Integrity Unit), l’autorité en charge de la lutte contre le dopage dans l’athlétisme, qui fournit un travail sans relâche pour son sport. En revanche, et à titre d’exemple, la Fédération internationale de force athlétique (IPF) ne communique plus de cas depuis plus de six mois. Preuve que les objectifs d’harmonisation des règles et de transparence restent encore en chantier.
Ainsi l’AIU, les agences nationales antidopage et la presse ont dévoilé, au premier semestre, 74 cas en athlétisme, qui reste de loin le sport le plus touché. Ont notamment été incriminés au deuxième trimestre la vice-championne du monde à la longueur et au triple saut Maryna Bekh-Romanchuk et le Kenyan Benard Kibet Koech, détenteur du record du monde du 10 miles. Le MMA, dont nous avions déjà souligné le nombre croissant de cas au cours de nos précédents bilans, est désormais le troisième sport le plus cité avec 28 cas révélés au cours du premier semestre 2025. L’AFLD (Agence française de lutte contre le dopage) avait déjà identifié cette tendance sur ce sport il y a un an, lors de la publication de son rapport d’activité annuel.
La France est également le 3e pays le plus cité pour des cas de dopage et de fraude sportive avec des affaires concentrées sur quatre disciplines : l’athlétisme, le rugby, le tennis, pour des cas de corruption et/ou matches truqués, et les sports équestres. L’Hexagone reste cependant loin de la Russie et de l’Inde, dont la multiplication des cas, notamment en athlétisme, pose question.
RETOUR AU CALME EN CYCLISME ?
Et malgré les soupçons de triche grandissants depuis quelques années, seuls 9 cas de dopage en cyclisme ont été révélés après les six premiers mois de l’année. Depuis un an et l’affaire Andrea Piccolo, aucun coureur du World Tour n’a été cité. A l’échelon des Pro Teams, il faut même remonter à l’année 2022 pour voir un coureur incriminé. En revanche, deux coureurs évoluant au niveau Continental ont été contrôlés positifs au cours du deuxième trimestre.
Le cyclisme professionnel a payé, par le passé, un lourd tribut et a également dû jouer la carte de la transparence pour traverser les différentes tempêtes qu’il a subies. Aujourd’hui, le MPCC encourage toutes les parties prenantes de notre sport à être actrices de la lutte antidopage, qu’ils soient coureurs(ses), managers, organisateurs de courses, clubs amateurs ou encore supporters. Car c’est par l’union que la triche sera vaincue.
*Le 20 avril 2024, le quotidien américain The New York Times et la chaine de télévision allemande ARD ont publié une enquête selon laquelle 23 nageurs chinois ont été contrôlés positifs à la trimétazidine lors d’un meeting national (31 décembre 2020 – 3 janvier 2021), à quelques mois des Jeux olympiques de Tokyo (2021). La CHINADA, l’agence chinoise antidopage, n’avait suspendu aucun athlète, justifiant ses décisions par le fait que les nageurs avaient été victimes d’une contamination alimentaire.